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25 avril 2022

En héritage comme en partage.

Le soleil se levait sur la campagne endormie. Un peu de givre scintillait sur les branches des arbres dénudées par l'hiver. Le petit ruisseau emprisonné sous une mince couche de glace dévidait son cours sans bruit.
Assise prés de la fenêtre, maman somnolait. Dans ses songes peuplés d'images du passé, affleuraient à sa mémoire encore vive, les plus belles qu'elle ait pu garder. Elle se revoyait enfant. courant dans les prés de Charel. Le Youky et le Pyram à ses côtés. La Moutonne, la Frisade, la Jolie et même la Mignone mouraient d'envie d'aller au pré. Sablonière était à deux pas, c'est là qu'elles aimaient brouter. Sur des pentes bien ombragées, à deux pas de la vigne et des pêchers. Maman aimait aussi aller garder. Elle retrouvait sa copine Jeanne, ensemble, elles papotaient tout en tricotant. Ainsi, jour aprés jour, le temps passait. Un jour, elles se marieraient, auraient des enfants, comme leur mère, elle apprendraient à tenir un foyer... un jour... peut être...Si c'est pas sûr, c'est quand même peut être.

 

La même campagne s'éveillait tandis qu'un coq chantait, le tintement du lait sur le seau emplissait déjà la maison. Les grosses Salers tiraient sur leur chaine afin de dérober un peu de fourrage dépassant de la crèche voisine.

La Jolie et la Jaccade savouraient leur repas. Sans doute, rêvaient elles aussi à de douces et vertes prairies ensoleillées. La tristesse des journées grises d'hiver les tenait au repos dans leur étable dont elles ne sortaient plus que pour se rendre boire au bac au coin de la maison en haut du chemin. Tout comme la Charmante et la Bonde, leurs deux turbulentes comparses aussi vaillantes aux labours que pour tracter les lourds chargements de paille, de bois ou de foin ou encore la batteuse quand venait le temps d'engranger le grain qu'elles avaient contribué à cultiver sillon aprés rangée sur les pentes rocailleuses de la Sagne ou des Enclos.... Toute une vie de labeur. De souffrance. De résignation. De privations. Sans jamais se plaindre. Sans jamais attirer le regard sur soi. Sans jamais ... En silence. Sans rechigner.

Cela a fait 11 ans qu'elle est partie. 11 ans, c'est vite passé. Pourtant pas un jour je n'ai cessé de la chercher. Dans les mots. Dans les pas. Dans les gestes. Dans les habitudes. Dans les regards. Dans les pensées. C'est fou ce que l'absence peut peser. C'est fou aussi comme elle peut meubler. Les silences. Les vides. les souvenirs. Les histoires. Les sentiers du passé au présent. Ceux qu'ensemble on a suivi. Ceux que sans elle on a accompli. Ceux qui nous ont réunis. Séparés. Ceux qui nous ont conduit de là où on était  vers où on est allé. Ceux qu'il nous appartiendra de suivre désormais. Elle nous a tout donné. Tout appris. Sans compter.  Nous sommes ce que nous sommes, c'est grâce à elle que nous ne sommes jamais devenus mauvais.  En héritage, comme en partage, merci d'avoir été.

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Commentaires
D
Je trouve normal ce genre d'échange qui ne peuvent qu'être constructifs et c'est moi qui te remercie, trés chaleureusement d'ailleurs (malgré la météo !) bonne soirée à toi.
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D
Bonjour Alainx, tout d'abord je voulais te remercier pour ce long message.<br /> <br /> J'ai toujours considéré tes avis avec beaucoup d'intérêt même si je ne suis pas toujours d'accord avec, car ils sont toujours à la fois pertinents et empreint de sagesse, l'école de la vie, probablement. Je pense que ton analyse est juste. Par contre, je n'ai pas souffert de l'éducation que j'ai reçu. Pour moi, elle n'était pas différente de celle que recevaient mes petits voisins, mes copains d'école, c'était pour tout le monde comme ça. On n'était pas marginalisé, nos parents eux mêmes avaient reçu cette éducation des leurs. La psychologie n’existait pas, pour personne. Dans les années 50, nos générations, certains furent vraiment malheureux, pas nous, et je ne l'oublie pas. Par contre, aujourd'hui, même si je me sens prisonnière de ces responsabilité que me confère cette éducation, je ne songe pas à m'en défaire, peut être un jour viendra où j'éprouverai le besoin de le faire. Je dis ça, car, je prends de plus en plus de distance avec ma fratrie par exemple, sans culpabiliser comme je le faisait avant. C'est un peu comme un fruit mur qui prend le temps de se détacher de son arbre, tu vois, tout ça va dans le sens (je trouve) de ce que tu expliques. On devrait toujours faire confiance à ceux qui savent et non à ceux qui croient et disent savoir, c'est pas pareil.. Je te souhaite une belle journée.
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D
Bonjour Gwen. Ma petite soeur est dans le même cas que toi par rapport à notre mère. Je suis l'ainée d'une famille nombreuse. On ne peut pas décrire ce genre de chose, on ne peut pas dépeindre ses sentiments. Il me semble à moi qu'il y a une teinte de culpabilité, encrée en moi à l'égard de mes soeurs et frère. Comme si je m'en voulais d'être passée première, d'avoir pris quelque chose qui a manqué aux autres derrière. Je ne me dis pas que si je suis passée première, c'était pour élaguer le passage, le rendre plus facile, car je n'en ai pas le sentiment. Par contre, celui d'avoir pris, est très fort. Peut être est - il justifié, peut être pas, qui pourrait le dire, le doute est là. Par contre que de gâchis pour tous ces êtres qui se sont ratés, loupés, parfois de peu, de trés peu, de tellement peu qu'il eut suffit de pas grand chose pour que la face de leur existence en soit changée et bien meilleure. Merci de ton retour Gwen.
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G
Ton texte est bouleversant et j'aurais aimé écrire comme toi un tel hommage à ma maman. Hélas ! Je suis le fruit non souhaité d'une union de dépit pour ma mère (de raison pour mon père) et nous nous sommes ratées, même si je lui dois beaucoup néanmoins...<br /> <br /> Il n'y a pas eu d'amour entre nous, j'avais si peur de lui déplaire pour ne pas déclencher ses reproches... et c'est bien triste !<br /> <br /> Mais j'ai au moins réussi l'inverse avec mes enfants...<br /> <br /> J'étais passé voir si tu as écrit ton devoir pour les lundis du Goût
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D
C'est toujours une source de culpabilité, pour moi aussi. Elle le savait de toutes façons qu'on l'aimait. Chez nous les choses se vivent avant de se dire. Je t'aime, et te le dis.
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